Emeutes en Grèce : statistiques de la Police sur l’identité des émeutiers arrêtés

Un curieux mélange de « Monsieur tout le monde » et de délinquants

Sur les 79 émeutiers arrêtés par la Police grecque pour les épisodes du 13 février 2012, 3 sont des mineurs de 14 à 17 ans, 41 ont entre 19 et 29 ans, 27 entre 31 et 39 ans, et les autres ont plus de 40 ans.

15 sont chômeurs, 4 étudiants, 2 élèves, 11 salariés du secteur privé, 2 professions libérales, un professeur, un avocat, un chauffeur , un réalisateur, deux travaillent dans le bâtiment, et 39 n’ont pas donné d’éléments sur leur activité.

En outre seulement les deux tiers, soit 53, sont Grecs, et 26 sont étrangers (1/3) parmi lesquels : 9 Albanais, 4 Algériens, un Tunisien, un Mauritanien, un Roumain, deux Polonais, un Afghan , un Moldave, 4 Palestiniens et un Irakien.

source (entre autres) : http://www.protothema.gr/greece/article/?aid=177119

Rappelons que la grosse majorité des manifestants sont pacifiques et mettent plutôt en avant un patriotisme citoyen  (photo de gauche), bien que la presse se focalise davantage sur ceux qui roulent plutôt en mode « anarchisant » ou « casseur ».

Mais que dans les deux cas, le manque de contre-propositions organisées et précises face aux besoins financiers immédiats du pays (pour payer les fonctionnaires notamment) est le principal handicap à leur efficacité.

A venir dès que votre serviteur en aura le temps:

– quelques extraits du dernier mémorendum et une analyse sur le véritable « hold-up » que subit la Grèce;

– une revue de presse sur les comparaisons entre la crise grecque et les réponses apportées par l’Argentine à une crise comparable.

Rémunération des députés grecs : la réponse du Président du Parlement grec et d’une députée du SYRIZA à l’article de J. Quatremer (Libération)

Le 6 février 2012, le journaliste français Jean Quatremer (de Libération), publiait un article intitulé « Heureux qui, comme un député grec, a touché le pactole… ».

« L’info » selon laquelle ils toucheraient 8500 euros nets ne se base pas sur les chiffres en cours mais elle est relayée, semble-t-il sans vérification de son actualité, par le Nouvel Obs et rue 89.

Extraits :
« Saviez-vous que les 300 députés grecs de la Vouli (le parlement monocaméral local) sont parmi les mieux payés d’Europe ? Et qu’ils refusent fermement toute baisse de salaire, alors qu’ils n’hésitent pas à réduire les revenus de leurs compatriotes ? »

« Le salaire mensuel net d’un député grec s’élève à la coquette somme de 8500 euros nets par mois. À cela il faut ajouter une indemnité pour frais de 4900 euros, une indemnité pour participation aux commissions parlementaires de 1200 euros, une indemnité de logement de 1000 euros (pour les députés de province), un forfait de 1800 euros pour les frais de bureau ainsi que les transports gratuits. »

Cet article a été envoyé à M. Petsalnikos, Président du Parlement grec, avec une traduction du paragraphe qui précède et du fait que les députés étaient accusés de refuser fermement toute baisse. M. Petsalnikos a été averti que son éventuelle réponse serait transmise à Jean Quatremer et publiée sur un blog.

M. Petsalnikos conteste les chiffres avancés par cet article.

Voici donc pour les lecteurs d’Europe-Grèce, sa réponse, reçue peu de temps après :

« En réponse à l’e-mail que vous m’avez envoyé, à l’occasion de l’article d’un journaliste français, je vous fais savoir que sa référence à la rémunération des députés grecs ne correspond aucunement à la réalité.

Plus précisément :

Au cours de ces 2 dernières années, le total des revenus des députés grecs a  considérablement diminué.

Les députés grecs ont décidé :
– la réduction de l’indemnité parlementaire et la suppression complète des bonus de Noël, de Pâques et de congés;
– le non-paiement d’un mois d’indemnité parlementaire mensuelle entière;
– la prise en charge, mensuellement, du paiement de la surtaxe spéciale de solidarité à un taux de 5% qui est supérieur au taux [payé] par n’importe quel autre citoyen grec, et de la contribution au profit des chômeurs et de l’OAED |un peu l’équivalent de Pôle Emploi, ndt] qu’ils paient chaque mois;
– la réduction de 50% de l’indemnité pour participation aux réunions des commissions.

Les coupes et les réductions opérées sur les recommandations du Président du Parlement et les décisions du Parlement réuni en session plénière approchent les 50% du total des émoluments* mensuels des députés.

Le total des émoluments* mensuels que perçoivent les Députés ne dépasse pas 4500 euros, avec lesquels ils doivent couvrir les loyers et les dépenses de fonctionnement de leurs bureaux dans leur circonscription, les dépenses de carburant et de déplacement, etc.*

Enfin il est souligné qu’avec les coupes et les réductions des émoluments des députés, des employés et des dépenses de fonctionnement du Parlement, le budget total de fonctionnement du Parlement a été réduit de 25% par rapport à 2009.« 

* Pour ne pas qu’il y ait d’ambiguité sur les termes nous avons traduit le terme « αποδοχές »  par « émoluments »  (le dictionnaire spécialisé Hiotakis propose aussi pour ce mot : rémunération, paiement, salaire, traitements, appointements)

Nous laissons le texte en grec si certains veulent contester ou discuter la traduction, par souci de transparence :

« Objet : RE:

Απαντώντας στο email που μου στείλατε, με αφορμή άρθρο Γάλλου δημοσιογράφου, σας γνωρίζω ότι η αναφορά του στις αμοιβές των Ελλήνων Βουλευτών ουδόλως ανταποκρίνεται στην πραγματικότητα.
Πιο συγκεκριμένα :
Στο διάστημα των 2 τελευταίων ετών οι συνολικές αποδοχές των Ελλήνων Βουλευτών έχουν μειωθεί σημαντικά.
Οι Έλληνες Βουλευτές αποφάσισαν:
–          Την μείωση της Βουλευτικής αποζημίωσης και την ολοσχερή κατάργηση των επιδομάτων Χριστουγέννων, Πάσχα και αδείας.
–          Την μη καταβολή μιας ολόκληρης μηνιαίας αποζημίωσης
–          Την επιβάρυνσή τους μηνιαίως με την καταβολή της ειδικής εισφοράς αλληλεγγύης με συντελεστή 5%, που είναι μεγαλύτερος από τον αντίστοιχο συντελεστή οποιουδήποτε άλλου Έλληνα πολίτη, καθώς και με την εισφορά υπέρ των ανέργων και του ΟΑΕΔ που καταβάλουν μηνιαίως.
–          Την μείωση κατά 50% της αποζημίωσης για συμμετοχή σε συνεδριάσεις επιτροπών.
Οι  περικοπές και μειώσεις που επήλθαν από τις εισηγήσεις του Προέδρου της Βουλής και τις αποφάσεις της Ολομέλειας του Κοινοβουλίου, αγγίζουν το 50% των συνολικών μηνιαίων αποδοχών των Βουλευτών.
Οι συνολικές μηνιαίες αποδοχές που λαμβάνουν οι Βουλευτές δεν υπερβαίνουν τα 4500 Ευρώ, και αυτές πρέπει να καλύψουν τα ενοίκια και τα λειτουργικά έξοδα των γραφείων τους στη εκλογική τους περιφέρεια, τα έξοδα καυσίμων για την μετακίνησή τους κλπ.
Τέλος σημειώνεται ότι με τις περικοπές και μειώσεις στις αποδοχές των Βουλευτών, των υπαλλήλων καθώς και των λειτουργικών εξόδων του Κοινοβουλίου μειώθηκε ο συνολικός προϋπολογισμός της Βουλής των Ελλήνων κατά 25% σε σχέση με το έτος 2009. »

Mise à jour:

Comme rue 89 et le nouvel obs ont repris ces chiffres et que certains sont allés jusqu’à dire que M. Petslanikos mentait, voici également la réponse de la députée du SYRIZA Evangelia Ammanatidou-Paschalidou quant à  la véracité des chiffres de l’article de Jean Quatremer :

Après nous avoir expliqué la position de son parti et le fait que les chiffres de l’article de Jean Quatremer dataient de 2009, Mme Ammanatidou-Paschalidou, députée de Macédoine grecque, nous indique que le montant total de sa rémunération mensuelle s’élève à une somme perçue nette de 4150 euros par mois tout compris (y compris les indemnités pour organisation du bureau – familiales – frais postaux – et coût des transports qui varient en fonction de l’éloignement de la région d’origine du député); en brut la somme est de 8500 euros bruts sur lesquels sont pratiquées les diverses retenues (impôt sur le revenu à la source, contribution spéciale de solidarité, sécurité sociale, prélèvement automatique destiné au parti d’appartenance, retraite, etc) soit 4350 euros de retenues.

Mme Ammanatidou-Paschalidou nous indique également que dans la mesure où sa circonscription se trouve à Thessalonique elle et son autre camarade député du SYRIZA originaire de cette région, partagent leurs frais de permanence en province pour un total d’environ 2200 euros par mois, montant qui selon elle est souvent dépassé en cas d’obligations exceptionnelles.

Dans la mesure où on ne peut pas soupçonner M. Petsalnikos (PASOK, socialiste) et le Syriza (extrême gauche) de collusion, l’on nous permettra de considérer que les chiffres de l’article de Jean Quatremer ne sont pas à jour.

La somme de 4150 euros touchée rejoint ce que nous avait indiqué le Président du Parlement qui parlait de 4500 euros maximum perçus par les députés.

Voici la réponse de Mme Ammanatidou-Paschalidou en grec, toujours par souci de transparence pour ceux qui voudraient traduire :

 « Τα συνολικά μεικτά ποσά που αναφέρονται στο δημοσίευμα είναι από το δημοσιευμένο και ελεγμένο ΠΟΘΕΝ ΕΣΧΕΣ του 2009.
Οι αποζημιώσεις από τότε και καλώς, έχουν μειωθεί.
Σήμερα  το σύνολο των ακαθάριστων εσόδων ανέρχεται στις 8.500 ευρώ συμπεριλαμβανομένης της βουλευτικής αποζημίωσης και όλων των επιδομάτων (Επίδομα Οργάνωσης Γραφείου-Οικογενειακής παροχής-Ταχυδρομικά τέλη-Έξοδα Κίνησης τα οποία ποικίλουν ανάλογα με την εκλογική περιφέρεια και άρα δεν είναι τα ίδια για κάθε βουλευτή).
Από τα παραπάνω αφαιρούνται οι πάγιες, οι λοιπές και οι επιπλέον κρατήσεις (Υγειονομική Περίθαλψη – Υπέρ Κομματ(20% με πάγια εντολή).- Κλάδος Σύνταξης – ΕΤΑΕΑ ΦΕΚ 115/α/20-5-11 – Φόρος εισοδήματος –  4024/2011 – ΤΠ και Δ – Ειδ. Έισφ. Αλληλεγγύης – Ειδ. Εσφ. Αλλ. Αρ.29 ν.3986/2011- Ειδ. Εισφ ΟΑΕΔ – Τ.Α.Β.) Για εμένα είναι 4.350ευρώ.
Άρα το τελικό ποσό που αφορά εμένα είναι 4.150ευρώ.
Ως βουλευτής επαρχίας καλύπτω με το συνάδελφο Τ.Κουράκη από κοινού όλα τα έξοδα για την οργάνωση και λειτουργία των γραφείων μας ΣΥΡΙΖΑ(ενοίκιο-υλικά Η/Υ-γραφική ύλη, ΔΕΗ, αέριο κλπ, κατά μέσο όρο 800ευρώ/μήνα/βουλευτή) όπου στεγαζόμαστε στη Θεσσαλονίκη, τις μετακινήσεις μου στην Αθήνα (βενζίνες-διόδια-φαγητά/800ευρώ/μήνα), τις μετακινήσεις μου στη Βόρειο Ελλάδα τα Σαββατοκύριακα(είμαστε μόνο 2 βουλευτές σε όλη τη Μακεδονία-Θράκη/600ευρώ/μήνα).  Σύνολο παγίων περίπου 2.200 ευρώ/μήνα.
Σας περιέγραψα με έναν τρόπο τις υποχρεώσεις ενός βουλευτή από την επαρχία που είναι κάθε εβδομάδα στο κοινοβούλιο(3-5 ημέρες ανάλογα με το πρόγραμμα) και τις λοιπές ημέρες στην περιφέρεια.
Τα ποσά είναι κατά προσέγγιση και αρκετές φορές φυσικά αυξάνονται και από έκτακτες υποχρεώσεις.
Δεν ξέρω αν σας βοήθησα καθόλου όποτε θελήσετε είμαι στη διάθεσή σας.

Με εκτίμηση,

ΑΜΜΑΝΑΤΙΔΟΥ-ΠΑΣΧΑΛΙΔΟΥ ΕΥΑΓΓΕΛΙΑ
Βουλευτής  ΣΥ.ΡΙΖ.Α.  Β΄ Θεσσαλονίκης »

 (A.O.)

Aide militaire de la Grèce à la FYROM (2001-2002)

Petite anecdote.

On l’ignore mais dans les années 2001-2002, la Grèce a offert un certain nombre d’hélicoptères UH-1 Huey et des blindés Léonidas 1 à l’ex-République yougoslave de Macédoine (ARYM/FYROM) pour l’aider à combattre la rébellion albanaise (en photo, un blindé grec monté par des soldats de l’armée de SKOPJE qui l’a équipé d’une plaque de caoutchouc).

Des blindés totalement dépassés pour la guerre moderne, (leur conception a 50 ans  comme c’est le cas de presque  tous les transports de troupes de l’armée grecque qu’on présente comme soi-disant très moderne) et des hélicoptères dignes du film Apocalypse Now…

Mais suffisants, à l’époque, pour combattre une guérilla. L’armée de la FYROM s’est davantage équipée depuis.

Les relations entre la Grèce et la FYROM n’étaient pourtant pas au beau fixe. Mais le gouvernement grec de l’époque y avait vu une occasion d’apaiser les tensions et de créer des perspectives de coopération. En vain.

C’est que la Grèce et la FYROM auraient beaucoup d’intérêts communs si ne les divisaient pas, non seulement « la question du nom » comme on la résume si mal, mais aussi l’ambigüité savamment entretenue par Skopje sur la place du  nord de  la Grèce dans son roman national (en tout cas du point de vue grec, que nous avons défendu dans ce blog) . Celle-ci est assez bien résumée par la question de ces habitants de Macédoine grecque qui sont  considérés comme nationalement « Slaves » par Skopje, mais qui eux-mêmes se sentent grecs (en grande majorité) et qui dans ce cas, sont désignés sous le terme péjoratif de « Grékomans » par les nationalistes de la FYROM.

On accuse souvent la classe politique grecque de nationalisme à des fins politiciennes.

On oublie de noter que le premier ministre actuel de la FYROM appartient au « VRMO » qui se dit l’héritier du mouvement irrédentiste du même nom et des Comitadjis, ces troupes d’irréguliers  qui combattaient pour la nationalisme slave en Macédoine (le nom du parti est « VMRO-DPMNE » qui signifie « Organisation révolutionnaire macédonienne intérieure – Parti démocratique pour l’Unité nationale macédonienne », et reprend le sigle « VRMO » qui signifiait « Organisation révolutionnaire macédonienne intérieure« ).

La question semble difficilement soluble : comment réconcilier les positions de Skopje avec celles des Grecs, qui rappellent que l’occupation de la Grèce du nord par les Bulgares alliés aux nazis pendant la 2e guerre mondiale s’est aussi faite au nom du panslavisme et des thèses sur la « re-slavisation » du nord de la Grèce? C’est la vision qui avait alimenté l’irrédentisme bulgare, a été abandonnée par celui-ci, a été  reprise par l’irrédentisme de façade de Tito, puis par le discours sur la « Macédoine historique », la « Macédoine slave », la « Macédoine  égéenne » perdue, comprenant Thessalonique.

Certes la FYROM est en prise avec la question albanaise. La Grèce l’est moins, mais connaît la faillite.

Cependant ce n’est pas un argument suffisant pour que les uns et les autres abandonnent ce que les uns et les autres considèrent comme une atteinte à leur identité.

Sous forme de boutade nous avions suggéré que Skopje reconnaisse adopter tout l’héritage macédonien antique y compris, donc, la langue grecque, pour rapprocher culturellement les deux peuples. Mais cette vision se heurte à ceux qui , à Skopje, considèrent sans doute avec raison que leur identité est uniquement slave.

Bref, une vraie salade macédonienne.

Un article en grec sur les livraisons d’armes :

http://www.enkripto.com/2008/06/blog-post_6090.html

Un autre sur le fait qu’en réplique aux thèses de Skopje, certains Grecs se mettent à développer des thèses sur une minorité grecque en FYROM devant le Conseil de l’Europe:

http://diolkos.blogspot.fr/2012/01/100000.html

Bon voyage, Theo

Pour ceux qui n’aimaient pas ses films qu’ils trouvaient trop longs, Angelopoulos était ce que la Grèce est pour la zone euro, dans le monde de l’efficacité et de la vitesse: un emmerdeur.

Pour les autres c’était comme un peintre, tellement avide d’exprimer sa vision de l’homme et de la grécité, que la toile n’était pas assez grande, et les tubes de peinture pas assez remplis. Continue, petite Grèce, à nous donner de tels emmerdeurs.

Ses films sont autant des films que des pièces tragiques, des ballets et des rêveries.

Différent, et aussi exigeant envers lui-même qu’envers ses spectateurs.

En apprenant la nouvelle de sa mort, en me demandant ce qu’il avait pu ressentir au moment précis de son passage d’un monde à l’autre, j’ai ressenti que le temps s’était arrêté quelques instants, comme devant le train qui démarre dans « Eléni », comme ce que j’ai ressenti lorsque j’ai entendu pour la première fois, avant d’avoir vu le film, le titre du  » pas suspendu de la cigogne. »

Mort hier, le 24 janvier 2012. Cela fait justement une éternité et un jour.

Theo. Un Grec.

kalo taxidi, Theo.*

*Bon voyage, Theo

Humour tragi-comique sur la crise et la générosité migratoire

*

Georges Papandréou et les pays de l’Union européenne veulent à tout prix faire mentir le vieil adage selon lequel « charité bien ordonnée  commence par soi-même ».

Voici ce que déclarait Georges Papandréou (à l’époque Premier ministre d’un pays en faillite qui ne parvient pas à nourrir sa propre jeunesse, ndlr) le 10 septembre 2010 :

« A l’heure où d’autres pays de l’Europe chassent les immigrés et les Roms, nous, nous leur ouvrons les portes. »

Petite remarque  : l’Union européenne pourra lui descerner le brevet de la générosité suicidaire, elle  qui tout en reprochant aux Grecs de mal accueillir les immigrés clandestins, asphyxie la Grèce sous le poids de l’immigration clandestine en raison des accords de Dublin II. Ceux-ci prévoient que le pays où arrive un immigré clandestin doit le reprendre s’il le quitte pour un autre pays : or c’est par la frontière gréco-turque que passent 90% des clandestins vers l’Union européenne, arrivant par avion en Turquie, puis dirigés vers la frontière par des passeurs au vu et au su de tous.

* (Pardon aux bisounours)

« Par solidarité, je suis Grec aussi. »

Que l’on partage, ou pas, les opinions exprimées dans son blog ou son appel, voici une belle initiative de l’association culturelle « Nantes Est Une Fête ! » (N.E.U.F.), qui fait déjà le tour de la toile:

http://jesuisgrec.blogspot.com/2011/11/declaration-dintention-ouverte-la.html

Histoire commune

Petit extrait d’actualités anglophones sur les pilotes grecs oeuvrant pour les alliés, au Moyen-Orient, pendant la 2e guerre mondiale.

Histoire de rappeler que sur la longue durée et les choix importants, la Grèce a toujours combattu aux côtés de ses alliés européens et occidentaux (ceux qui méprisent aujourd’hui son histoire et parlent de « malentendu » entre la Grèce et l’Europe, ne peuvent pas en dire autant de tous ses voisins, ou partenaires européens).

Hawker Hurricane Mk IIb 335th Sqdr RHAF – Royal Hellenic Air Force 1942

Sur la 2e guerre mondiale, voir aussi:
Pétition pour le remboursement du prêt forcé : déjà 72.000 signatures

Grèce : l’espoir de l’or noir.

Les Grecs placent une partie de leurs espoirs pour émerger de leur dette, dans la découverte de pétrole au sud de la Crète, en mer Ionienne, et dans le nord de la mer Egée.

Le professeur Foskolos a qualifié de « crime » le fait de ne pas avoir poursuivi les recherches de pétrole en 1997.

Les nouvelles technologies permettent d’exploiter le pétrole à des profondeurs jusqu’alors inaccessibles pour ce type d’activités.

Selon lui il y aurait 22 milliards de barils de pétrole au sud de la Crète; il estime les perspectives de développement en la matière à 2016-2017, et déclare que le sud de la Crète est aussi riche que l’Iran.

Exploiter cette ressource signifie aussi qu’il faudra, à terme, relever les défis diplomatiques et miliaires tels que la fixation de la zone économique exclusive avec la Libye et l’Egypte (ce qui pose problème car la Turquie refuse à la Grèce le droit de déterminer sa zone par rapport à certaiens îles grecques situées à l’est de Rhodes, et revendique ainsi une « frontière » entre sa zone et celle de l’Egypte au détriment de la zone grecque). Les défis écologiques, aussi.

Le ministre de l’environnement Yannis Maniatis a également déclaré qu’il y avait du pétrole en Grèce et que les premiers résultats des recherches pouvaient faire espérer que les Grecs ne seraient pas déçus.

Maniatis a fait référence à l’intérêt israélien pour coopérer avec la Grèce dans le domaine énergétique (la Grèce et Israël tentent d’accroître très sensiblement leur coopération ces derniers mois, dans tous les domaines et les Israéliens, comme les Chypriotes, ont découvert d’importantes réserves de gaz dans leur zone économique exclusive). Une coopération gréco-israélienne en la matière pourrait bouleverser favorablement les équilibres stratégiques dans la région.

La question et de savoir si ces ressources sont exploitables à grande échelle, et si les créanciers de la Grèce s’en empareront à vil prix, ou si le peuple grec pourra les exploiter réellement comme l’a fait, par exemple, le peuple norvégien avec son fonds de développement pour les générations futures.

La Grèce étant habituellement considérée comme plutôt pauvre en ressources naturelles, ces déclarations ne peuvent en empêcher certains d’afficher leur scepticisme.

Les amis de la Grèce croisent les doigts pour que tout cela soit vrai… Et que la Grèce sorte de la dépendance au tourisme, pilier de  son économie qui la rend trop fragile face aux crises.

Sources

http://www.inews.gr/96/i-kriti-echei-oso-petrelaio-kai-to-iran.htm

http://www.iefimerida.gr/news/29286/%CE%BC%CE%B1%CE%BD%CE%B9%CE%AC%CF%84%CE%B7%CF%82-%C2%AB%CF%83%CF%84%CE%B7%CE%BD-%CE%B5%CE%BB%CE%BB%CE%AC%CE%B4%CE%B1-%CF%85%CF%80%CE%AC%CF%81%CF%87%CE%B5%CE%B9-%CF%80%CE%B5%CF%84%CF%81%CE%AD%CE%BB%CE%B1%CE%B9%CE%BF%C2%BB

« Allumer le feu! » : paranoïa grecque ou réalité?

Voici quelques brèves sur les relations gréco-turques.

Vous nous excuserez de compiler 4 billets en un mais ce n’est pas le thème principal du blog. En même temps vu que la presse française n’en parle pas… Il faut bien réparer cette omission.



Question sur la « parano » grecque n°1 : quel rapport entre les incendies de forêt en Grèce et la Turquie?

Incroyables révélations du journal turc Birgün : les services turcs seraient à l’origine de nombreux incendies de forêts commis en Grèce pendant les années 90 (http://www.birgun.net/politics_index.php?news_code=1324643597&year=2011&month=12&day=23).

Tout commence par une interview au journaliste Enver Aysever publiée le 23 décembre 2011. Le journaliste s’intéresse aux secrets d’Etat; lors d’une conversation téléphonique, l’ancien premier ministre turc Mesut Yilmaz fait alors référence à un rapport sur les opérations menées avec les fonds secrets de l’Etat turc; il évoque des incendies de forêt commis par les services secrets turcs en Grèce « à titre de représailles » dans les années 90, du temps de la première ministre turque Tansu Ciller. Il fait aussi allusion à l’organisation d’un coup d’état en Azerbaïdjan par la Turquie.

Stupeur en Grèce : le ministre des affaires étrangères grec demande des explications au gouvernement turc au sujet des incendies (étant précisé que les plus grands incendies criminels qui aient jamais ravagé la Grèce n’ont jamais été élucidés).

Réaction immédiate et très embarrassée de Mesut Yilmaz qui essaie d’expliquer qu’on l’a mal compris; en substance : « on a mal compris mes propos », les Grecs auraient mal interprété et réagi trop vite, il disait autre chose. (http://siyaset.milliyet.com.tr/mesut-yilmaz-yanlis-anlasildi/siyaset/siyasetdetay/27.12.2011/1480946/default.htm)

Réaction immédiate,du journal Birgün dans un article du 28 décembre 2011, qui persiste et signe dans une réponse à Mesut Yilmaz; en substance : « on avait très bien compris, on n’a rien inventé, c’est bien ce qu’a dit Mesut Yilmaz. »

Puis, avalanche de révélations de la presse turque :

・ Le journaliste turc Can Dündar du journal Milliyet dans un article du 29 décembre 2011, affirme qu’une opération a bien été menée au sein d’un camp militaire de l’armée grecque à Lamia, ainsi que des opérations d’incendies de forêts à Rhodes et dans d’autres régions touristiques, ainsi que des opérations en Crète, à titre de représailles à la politique du gouvernement grec vis à vis des rebelles Kurdes et à l’accueil de certains membres de la rébellion kurde par la Grèce (http://gundem.milliyet.com.tr/ormanlari-kim-yakti-/gundem/gundemyazardetay/29.12.2011/1481661/default.htm) .
・ Puis le journal Vatan embraye (en fait dès le 27 décembre 2011) en faisant référence à un rapport concernant un scandale connu en Turquie sous le nom de « Susurluk » ; selon le journal, 12 pages du rapport sont consacrées aux incendies en Grèce par les services turcs. (http://haber.gazetevatan.com/Haber/420360/1/Gundem)

Bref les plus grands journaux turcs confirment l’information.

La confrontation entre kémalistes et islamistes (ou entre les kémalistes entre eux) a le mérite de libérer la parole et de faire ressortir la vérité sur un certain nombre d’égarements que les seconds attribuent aux premiers. Comme le dit Can Dündar, les deux peuples ont le droit de savoir.

La presse d’Europe occidentale accuse souvent les Grecs de paranoïa vis à vis de la Turquie, surtout lorsqu’on aborde les questions de sécurité.

A l’inverse quand on suit l’actualité gréco-turque sur la question, on découvre un fort niveau de tensions et le fait que les gouvernements grecs veulent éviter toute publicité autour de ces événements, préférant ne pas les relayer.

Concernant les « incendies mystères », il y avait bien eu par le passé des rumeurs, en Grèce, sur la participation de Turcs aux plus grandes incendies de forêt qu’ait connus le pays, mais rien d’officiel.

Certains hommes politiques avaient parlé d’incendies causés par la Turquie, mais la presse grecque les avait accusés de fantasmer à des fins électorales, les avait traités de paranoïaques et d’extrémistes hostiles à l’amitié gréco-turque et avait tourné la page.

Malheureusement, les plus « paranoïaques » disaient vrai…



Question sur la « parano » grecque n°2 : la « paranoïa » grecque va-t-elle se calmer?

A terme, il est peu probable que les inquiétudes grecques se calment malgré le renouvellement de la classe politique turque.

Ainsi selon le media turc « Haber turk », le premier ministre turc Erdogan a annoncé un programme de missiles balistiques d’une portée de 2500 kilomètres, capables d’atteindre la Chine occidentale, le Soudan, le nord de la Russie ou l’Europe occidentale (http://www.haberturk.com/gundem/haber/701120-turk-fuzesi-hedef-menzil-2500-km).

La Turquie confirme ses ambitions de devenir une super-puissance. La Grèce doit-elle craindre sa finlandisation?


Question sur la « parano » grecque n°3 : la Turquie, un exemple pour la Grèce?

Question qui heurtera tout Grec bien sûr.

Excusez-moi donc, et pourtant…

Après tout la Turquie pourrait donner l’exemple à la Grèce : l’exemple d’une politique patriotique visant le long terme, dont l’ambition est de construire un état fort, une puissance industrielle forte sous l’impulsion de l’état tout en développant le secteur privé, de doter les citoyens d’une idéologie apte à les souder (en Turquie, au choix, le kémalisme et l’islamisme modéré), d’une éducation nationale visant à développer la fierté d’être turc et à promouvoir la culture turque (à l’heure où la Grèce, avec 20 ans de retard, croit que l’avenir est de copier le modèle « multikulti » allemand dont Angela Merkel a pourtant dit qu’il avait échoué).

Ca c’était la minute réac’ de votre serviteur. Quoique… Chaque pays doit faire ça à sa sauce mais après tout.


Question sur la « parano » grecque n°4 : et l’entrée de la Turquie dans l’UE?

Saisissons l’occasion pour aborder la question de l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.

Le parlement turc vient de voter une loi interdisant l’achat de propriétés par des étrangers dans les zones où le quota de bien achetés par les étrangers dépasse déjà 10%. Voir cet article du journal ABC à ce sujet (http://www.abc.es/20111215/internacional/abci-turquia-terrenos-extranjeros-201112151118.html, je sais c’est en espagnol que voulez-vous ce blog est un peu cosmopolite).

Quel rapport avec notre sujet?

On l’ignore en France, mais les leaders des deux plus grands partis politiques grecs (Nea Dimokratia et Pasok) sont totalement favorables sur le principe à l’entrée de la Turquie dans l’UE, « une fois les conditions remplies ». De quoi dérouter l’européen moyen à qui la presse a présenté les politiques grecs comme des nationalistes irresponsables. Loin de tout nationalisme, mais peut-être pas loin de toute irresponsabilité, certains dirigeants grecs s’imaginent que l’appartenance de la Turquie à l’union européenne leur évitera d’avoir à défendre la Grèce face aux revendications turques (sur les eaux territoriales et l’espace aérien, et la contestation de la souveraineté grecque sur certaines îles notamment). Chacun jugera.

A l’inverse selon les sondages, la majorité de la population grecque est opposée à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.

Or parmi les nombreux arguments de ceux qui s’opposent à la candidature turque, il en est un qui nous intéresse particulièrement ici : certains craignent que l’entrée de la Turquie dans l’union européenne ne se solde par l’installation définitive de Turcs dans les îles et les régions frontalières. Ils craignent que cela ne fasse basculer l’équilibre démographique de ces régions. Celles-ci seraient ainsi, de fait « turcisées ». « Tout ça pour ça » pourrait-on dire, en contemplant la lutte de plusieurs générations de Grecs pour créer un état grec sur les ruines de l’impérialisme ottoman.

Et là vous me direz : la peur d’être envahi, voilà bien un truc de parano, hein? On l’a trouvée la paranoïa grecque…

Sauf que… la meilleure preuve que ces craintes ne sont peut-être pas infondées provient de la Turquie elle-même… L’exemple turc!

Le parlement turc, donc, vient de voter une loi interdisant l’achat de propriétés par des étrangers dans les zones où le quota de bien achetés par les étrangers dépasse déjà 10%
.

Si la Turquie a de telles craintes, malgré sa démographie solide (et qui le restera vu l’importance de sa population même si le taux de fécondité diminue), peut-on se moquer de celles des Grecs? Ils ont peut-être raison. A terme, à 20, 50 ou 60 ans, qui pourrait garantir le contraire?

Rappelons aussi que Malte, avant d’entrer dans l’Union européenne, a obtenu l’assurance que les citoyens européens ne pourraient acheter la terre maltaise, rare, au-delà d’un certain quota. Pour que Malte reste aux Maltais. Au-delà des aspects juridiques il y a les crises, l’histoire. Sur la longue durée, que vaut une garantie de papier?

Lorsqu’on voit comment Allemands et Italiens se sont implantés dans certaines îles grecques (les Allemands dans certains villages de Corfou par exemple), une telle crainte n’a rien d’une chimère d’autant que la Turquie est en plein développement et beaucoup plus proche géographiquement des îles grecques ou de la Thrace que l’Allemagne ne l’est de Corfou… Quand on sait que la démographie a joué un plus grand rôle que les armes dans la conquête de l’Anatolie par les Turcs, l’argument démographique ne manque pas de sérieux sur la longue durée. D’autant plus que la démographie grecque a toujours été faible, elle. Comme la Russie craint la démographie chinoise, en Extrême Orient… L’histoire du monde n’est pas pavée que de lendemains qui chantent et ces préoccupations sont parfaitement légitimes sur la longue durée, la longue histoire.

Rappelons que pour les Grecs les plus rétifs à l’intégration turque, la Turquie n’est pas un pays comme les autres. La Turquie est le pays qui se dit l’héritier de l’ancienne puissance coloniale, l’Empire ottoman.

Il est curieux que l’on soit prompt à vouloir éviter tout « néo-colonialisme » vis à vis des anciennes colonies françaises et que l’on ne prête pas attention au réflèxe anti-colonial du peuple grec vis à vis de la Turquie. Après tout les Grecs ne sont peut-être pas si « paranos » que cela.

Pétition pour le remboursement du prêt forcé : déjà 72.000 signatures

72.000 personnes ont déjà signé la pétition pour le remboursement du prêt forcé dont a bénéficié l’Allemagne aux dépens de la Grèce pendant la 2e guerre mondiale (http://www.greece.org/blogs/wwii/).

Pour le bien fondé de ces demandes,  cet article du point signé Michel Colomès: « Grèce, quand l’Allemagne oublie ses dettes  »

Quand la principale critique de l’opinion publique allemande envers la Grèce est qu’elle ne paie pas ses dettes et qu’on sait qu’il faudrait plusieurs décennies à la Grèce pour payer ses dettes actuelles, le débat ne manque ni de sel ni d’actualité.

Extraits :

 « Or, selon les calculs des spécialistes, la somme libellée en reichsmarks correspond aujourd’hui à 14 milliards de dollars, environ 10 milliards d’euros. De plus, si on affecte ce montant d’un taux d’intérêt classique de 3 % sur 66 ans, on parvient à un total de 95 milliards de dollars, 68 milliards d’euros, soit un cinquième de la dette grecque. Certes, cela ne suffirait pas à renflouer le Trésor grec, mais cela améliorerait grandement la situation »

Précisons que selon plusieurs historiens l’Allemagne n’a jamais non plus remboursé les dommages de guerre contrairement à ce qu’indique l’article, car il convient de distinguer les dommages de guerre causés à l’état grec de ceux subis par les particuliers. L’Italie, elle, s’est acquittée des réparations envers la Grèce… n’est pas « Pigs » qui l’on croit.

 

Selon Jacques Delpla, « l’Allemagne doit 575 milliards d’euros à la Grèce » (interview dans les Echos du 22 juin 2011).
http://archives.lesechos.fr/archives/2011/lesechos.fr/06/22/0201458716889.htm?texte=Jacques%20Delpla

« L’économiste, membre du Conseil d’analyse économique, a calculé que les Allemands doivent aux Grecs au moins 575 milliards d’euros au titre de la seconde guerre mondiale. Il estime que l’Europe doit absorber l’excès de dette en la refinançant par des taux d’intérêt très bas, en échange de réformes structurelles. »

Petit débat sur la Macédoine sur le blog « Europe Grèce »

Le présent billet est une compilation d’arguments ajoutés au fil de notre discussion avec un lecteur du blog; ce qui explique les redites – merci de privilégier le fond à la forme.

Nous avons transféré dans un commentaire unique tous les commentaires laissés sur le blog, auxquels avait donné lieu la photographie du premier ministre de l’ancienne République yougoslave de Macédoine (FYROM/ARYM), membre du parti nationaliste VRMO, en train de déposer une gerbe sur la tombe du leader nationaliste Goce Delcev, sous une carte de la »Grande Macédoine slave » incluant Thessalonique, ajoutée pour l’occasion.

Ce que nous voulions dire : que dans l’intimité des « célébrations nationales », certains membres du gouvernement actuel de la FYROM et une frange significative de la société de ce pays, n’avaient pas le même discours et la même attitude que face aux tiers. Que la tension entre les deux pays n’est pas « imputable qu’à la Grèce » contrairement à la caricature habituelle. Et que le discours actuel de Skopje autour de « l’identité macédonienne » aboutit à une équation impossible.

Il a paru intéressant d’y consacrer un billet à part, car cette discussion retrace les arguments les plus souvent avancés, et quelques autres, à propos de la question de la FYROM, dont le discours irrédentiste est donc assez bien résumé par cette photographie de 2008.

Le premier ministre de l’ancienne République yougoslave de Macédoine (FYROM/ARYM), membre du parti nationaliste VRMO, déposant une gerbe sur la tombe du leader nationaliste Goce Delcev, sous une carte de la »Grande Macédoine slave » incluant la ville grecque de Thessalonique.

Goce Delcev est d’ailleurs l’auteur de la citation célèbre : « Je ne comprends le monde que comme un terrain pour la compétition culturelle entre les nations ». Ces mots prennent tout leur sens dans la question macédonienne actuelle puisque sous couvert de débat culturel, il s’agit de modifier la perception de  l’identité actuelle  du nord de la Grèce.

Ci-dessous : la même carte, présentée par des Habitants slaves de Skopje accueillant les nazis lors de la 2nde guerre mondiale, brandissant un portait de Hitler et du roi Boris de Bulgarie (photographie diffusée par le journal grec Apogevmatini du 15 mars 2008) :

La Yougoslavie en 1939, sur un timbre d’époque. La région de Skopje (au sud) y prend le nom de « Vardarska », du nom du fleuve qui la parcourt (le fleuve Vardar/Axios), comme la plupart des autres régions yougoslaves d’alors:

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L’équation impossible, ou la contradiction fondamentale de Skopje

Ces dernières années, sous l’impulsion du VRMO-DPMNE (le parti au pouvoir à l’heure de la rédaction de ce texte), la FYROM revisite son histoire en tentant, plus que jamais, de créer un lien entre les Macédoniens de l’antiquité et les habitants actuels de la FYROM.

Ce qui est étonnant, c’est que cela se fait par le rejet de tout ce qui était « grec » chez les Macédoniens de l’antiquité. Toute l’esthétique et l’histoire des Macédoniens antiques y est glorifiée, mais purgée de tout ce qui y était grec (langue, appartenance au sous-groupe ethno-linguistique des Doriens etc).

Dans le même temps, le discours irrédentiste de la FYROM vis à vis de la Grèce se base sur tout ce qui est « slave »,  sur les influences slaves laissées dans le nord de la Grèce par les envahisseurs slaves du Moyen-âge.

C’est là que l’équation est impossible : puisque  « macédoniens antiques = culture et langue grecques », si « macédoniens d’aujourd’hui=macédoniens antiques », comment dans le même temps soutenir que « macédonien = culture slave issue des invasions du Moyen Age »?

En effet, la FYROM continue de considérer que certains villages bilingues de nord de la Grèce, où se parlait aussi un dialecte slave, devraient se considérer comme appartenant au même peuple que les habitants de Skopje, et non comme Grecs.

Mais dans le même temps, la FYROM considère aujourd’hui que ses habitants, et les habitants slavophones du nord de la Grèce, sont les descendants des Macédoniens antiques…

Il y a donc une contradiction fondamentale, entre se revendiquer d’une peuplade de culture grecque (les Macédoniens antiques) tout en considérant que c’est la slavité qui caractérise la « macédonité. »

En réalité, le discours actuel de Skopje légitime l’appartenance des slavophones du nord de la Grèce à la nation grecque, au peuple grec, à l’Etat grec moderne : si ces habitants doivent être considérés comme descendants des Macédoniens antiques, s’ils ont simplement subi une influence slave au Moyen Age en raison d’invasions et de conquêtes, quoi de plus légitime pour eux que de se dire Grecs, puisque les Macédoniens antiques étaient de langue et de culture grecques?

La réponse que les Grecs devraient opposer aux revendications de Skopje pour mettre la capitale de la FYROM face à ses contradictions, pour la mettre à la croisée des chemins et pour la contraindre à faire certains choix une fois pour toutes, pourrait (devrait?) être : « Mais alors, vous êtes Grecs? »

Mise à jour du 11/01/2012:

Pour comprendre.

« L’arc de l’irrédentisme » : c’est ainsi que la presse grecque commente « L’arc de Macédoine » inauguré à Skpoje (FYROM) en janvier 2012, construit dans le cadre du projet « Skopje 2014 », summum d’un style artistique nouveau, le kitsch nationaliste.

Une question parlementaire a été déposée par un député grec au Parlement européen  ce sujet et résume les réactions en Grèce. Celles-ci s’appuient notamment sur le fait que ce monument représente des éléments issus de toutes les « Macédoines » du roman national conçu par Skopje, incluant des éléments issus de régions grecques ou de régions albanaises, selon les explications de sa conceptrice Valentina Stevanovska qui a précisé que le monument représentait « toutes les régions de Macédoine » et que sur les côtés se trouvaient des représentations d’éléments du folklore « de la Macédoine du Vardar [ie FYROM], de la Macédoine du Pirin [ie Bulgarie de l’Ouest], de la Macédoine égéenne [ie nord de la Grèce], et de Mala Prespa [ie, à l’est de l’Albanie]. »

C’est d’ailleurs la communauté albanaise de la FYROM qui s’en est plainte la première.

Ajoutons que des voix en Grèce s’élèvent pour dénoncer l’accord bilatéral de 1995 entre la Grèce et la FYROM, pour violation par Skopje des règles de « retenue » contenues dans cet accord. Selon cet accord la Grèce ne peut pas s’opposer à l’entrée de ce pays dans une organisation internationale sous le nom de FYROM. C’est sur la base de cet accord que la Cour de La Haye a considéré que la Grèce ne pouvait pas s’opposer à l’entrée de la FYROM dans l’OTAN avec son nom officiellement reconnu par l’ONU (soit FYROM/ARYM).

Quittons maintenant la question de l’irrédentisme symbolique pour aborder celle de l’identité revendiquée par la FYROM.

Pour une réflexion d’ordre culturel, et non politique.

Voici les images de l’inauguration de « l’arc de la Macédoine » à Skopje, placées sous le signe de l’antiquité (grecque… mais surtout, de le dites pas à  nos amis de la FYROM) et des guerriers de l’antiquité :

La question de l’imaginaire irrédentiste et de l’identité sont liées me direz-vous.

Si l’irrédentisme qui vient d’être évoqué est inacceptable, en revanche d’aucuns pourraient dire qu’après tout, c’est le droit de chacun de se dire descendant des anciens Macédoniens.

Mais dans ce cas,  se pose une question de cohérence à laquelle je ne trouve pour ma part aucune réponse: si par exemple ces « guerriers » sont plus intéressés par la Macédoine antique que par leur identité slave, pourquoi ne pas aller jusqu’au bout de la logique, et donc apprendre la langue des anciens Macédoniens, le grec, l’utiliser au quotidien, ou encore gréciser leurs noms pour les faire ressembler à ceux des Macédoniens, au lieu de rejeter la grécité des anciens Macédoniens comme une maladie honteuse? En laissant un peu déborder l’imaginaire et en raisonnant par l’absurde on pourrait dire que sur le plan politique (ou politique-fiction), cette cohérence aurait le mérite de faire de la FYROM et de la Grèce des nations soeurs et de mettre fin à l’imaginaire irrédentiste puisqu’il n’y aurait aucune raison de se chercher querelle « entre Grecs » au 21e siècle.


Plus sérieusement, cette vision des « Macédoniens » est aussi contradictoire vis à vis de ceux que Skopje nomme les « Grékomans ».

« Grékoman » est le terme péjoratif donné par le « roman national » de Skopje à certains habitants du nord de la Grèce.

Selon ce « roman national », ces habitants seraient des « Slaves » identiques aux habitants slaves de la FYROM, et qui se considéreraient à tort comme des Grecs.

Ce seraient donc, des traîtres.

Où est la contradiction? Eh bien si Skopje considère désormais que les habitants de la FYROM descendent des Macédoniens antiques (qui n’étaient pas slaves, qui parlaient grec, avaient des noms grecs etc), elle ne peut pas reprocher aux habitants de la Macédoine grecque de considérer qu’ils ne sont pas slaves mais grecs.

Elle ne peut pas non plus leur reprocher de considérer que l’ancienne influence slave dans cette région n’était que le fruit d’une conquête postérieure à l’identité macédonienne d’origine (à savoir les invasions slaves du Moyen Age)…

Au contraire, Skopje devrait alors encourager tous les habitants de la FYROM à devenir eux aussi en quelque sorte des « Grékoman » (« гркоман »), c’est à dire à revenir à ce qui serait leur vraie origine…

Le Président Kiro Gligorov, premier président de la FYROM, insistait précisément sur le fait que les habitants de la FYROM n’avaient aucun lien avec l’identité macédonienne antique et qu’ils étaient des slaves arrivés là pendant le Haut Moyen Age.

Gligorov était un homme cultivé : son but était précisément de ne pas tomber dans l’impasse logique, historique et identitaire que nous venons de décrire.

Il y a manifestement deux grandes écoles de pensée à Skopje : d’une part ceux qui se disent descendants des Macédoniens anciens mais qui ne vont pas jusqu’au bout de leur logique puisqu’ils refusent la grécité des Macédoniens (dont acte, et refusent de verbaliser le fait que la langue des Macédoniens antiques était grecque ); et d’autre part, ceux qui se considèrent simplement slaves, comme l’ancien président Kiro Gligorov, décédé le 1er janvier 2012 :

. Autres « détails »

– Article 49 de la Constitution de « l’ex république yougoslave de Macédoine » :

« The Republic cares for the status and rights of those persons belonging to the Macedonian people in neighbouring countries, as well as Macedonian expatriates, assists their cultural development and promotes links with them. The Republic cares for the cultural, economic and social rights of the citizens of the Republic abroad. » Traduction sommaire par un non traducteur : « la République se préoccupe du statut et des droits des personnes appartenant au peuple macédonien dans les pays voisins, ainsi que des Macédoniens expatriés, aide à leur développement culturel et promeut les liens avec eux. La République se préoccupe des droits culturels, économiques et sociaux des citoyens de la République à l’étranger. »

On note au passage la jolie différence entre d’un côté ceux qui « appartiennent au peuple macédonien dans les pays voisins » et pour lesquels en plus des différents droits on veut « un statut », et de l’autre côté « les citoyens de la République à l’étranger » où là on ne parle que de droits (culturels et autres).

Quand on s’interroge à Skopje pour savoir qui sont les gens qui appartiennent au « peuple macédonien dans les pays voisins » dont leur République doit « se préoccuper » selon la Constitution… on retrouve la vieille revendication que la Bulgarie a eu la sagesse d’abandonner, et que Tito puis la FYROM ont reprise : certaines populations du nord de la Grèce seraient pour Skopje des membres du « peuple macédonien (slave) ».  Il s’agit pour l’essentiel, de ces « Grékomans. »

A noter :

Face au scandale provoqué par cet article des amendements ont été ajoutés mais l’article n’a jamais été supprimé.

Du coup la constitution est totalement contradictoire.

Voici les amendements :

«                         Amendment I

1. The Republic of Macedonia has no territorial pretensions towards
   any neighbouring state.

2. The borders of the Republic of Macedonia can only be changed in
   accordance with the Constitution and on the principle of free will,
   as well in accordance with generally accepted international norms.

3. Clause 1. of this Amendment is an Addendum to Article 3 of the
   Constitution of the Republic of Macedonia. Clause 2. replaces
   Paragraph 3 of the same Article.

                        Amendment II

1. In the exercise of this concern the Republic will not interfere in
   the sovereign rights of other states or in their internal affairs.

2. This Amendment is an Addendum to Paragraph 1 of Article 49 of the
   Constitution of the Republic of Macedonia.

   These Amendments are an integral part of the Constitution of the
   Republic of Macedonia and came into force on the day they were
   promulgated, on January 6th, 1992. »

Quand on lit l’article 49 on voit bien que l’amendement II”   ne le complète pas : les deux sont en totale contradiction. Pourquoi ne pas avoir supprimé l’article 49?

On ne peut pas dire qu’il faut un statut spécial pour des populations “macédoniennes ” dans les pays voisins et dire en même temps que “La république ne s’ingérera pas dans les droits souverains d’autres États ainsi que dans leurs affaires intérieures.” C’est en totale contradiction.


Et dire qu’il n’y a pas de prétentions territoriales tout en disant que les frontières peuvent être changées sur le principe de la libre volonté (de qui?) sans supprimer totalement l’article 49.

Et surtout, quand on dit cela, il faut que les actes suivent. Réclamer un statut à part pour une partie des citoyens grecs cela reste une forme d’irrédentisme surtout quand elle s’accompagne de cartes de la « Grande Macédoine » et autres symboles, livres scolaires, etc.

L’irrédentisme, ce n’est plus envahir un pays avec une armée pour procéder à un rattachement : les Albanais ont fait la Grande Albanie au Kosovo même sans rattacher le Kosovo à l’Albanie.

Mise à jour :

Dans le même registre:

Présence de l’ambassadeur de la FYROM et du consul général à Toronto  à une soirée de l’association « United Macedonians of Canada », « Goce Dlecev Night 2012 », à nouveau devant une carte de la « Grande Macédoine » (slave):

Autre document intéressant, pour ceux qui comprennent de bulgare et le grec, un documentaire bulgare de la chaîne Btv (en attendant une version sous-titrée).

On y entend un partisan des thèses actuelles de Skopje préciser que « le plus grand problème », la « Macédoine » (la FYROM) l’a avec… la Bulgarie qui ne reconnaît pas leur langue et qui ne les reconnaît pas comme une nation.

Le gouvernement actuel de Skopje et ses partisans n’en veulent donc pas qu’à la Grèce:

On y voit aussi Ljubčo Georgievski , leader du VMRO-NP, qui critique le VRMO-DPMNE actuellement au pouvoir, et qui l’accuse d’avoir totalement transformé l’histoire de l’ARYM depuis 3 ans, et d’avoir transformé la ville de Skopje en Disney Land ou en Parc Astérix.

Pour montrer le tournant pris ces dernières années à Skopje,  il  précise :

« Dans les livres scolaires, dans les publications académiques, dans les livres, massivement, là où jusqu’à hier il était écrit que les « Macédoniens » sont d’origine slave, maintenant il est écrit que les « Macédoniens » sont les descendants des Macédoniens antiques. »

Il est en tout cas très étonnant que les partisans du lien entre la Macédoine antique et la FYROM ne disent mot de l’identité linguistique grecque des macédoniens antiques, qui devrait les conduire à se considérer comme Grecs (en dernière analyse, c’est bien parce que ces thèses se heurtent à ce mur logique que des gens comme Ljubčo Georgievski considèrent qu’elles sont fantaisistes et qu’elles conduisent l’identité de la FYROM dans une impasse totale )…

Il est en tout cas important de noter que même en FYROM, certains considèrent ces thèses comme une absurdité. Les Grecs ne sont pas les seuls à penser ainsi.

Mise à jour mars 2014:

Une carte de la « Grande macédoine slave » dans une école de la FYROM fait le tour du web grec.

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« Ellada, agapi mou » par ETIENNE ROLAND

Une réaction passionnée parue sur le site du Monde, par l’Ancien directeur de l’Ecole française d’Athènes, professeur émérite d’archéologie grecque, Paris I Panthéon-Sorbonne.

Extraits :
« Je me sens profondément humilié dans mon philhellénisme quand un journal ose titrer que la Grèce est un « pays peut-être moins “européen” qu’il n’y paraît » et que le contenu de cet article est un mauvais résumé d’une histoire que les auteurs n’ont pas vécue ; je suis humilié comme Français que des compatriotes fassent si mal de l’histoire et nourrissent le mythe du Grec menteur et poniros. »

La suite ici :

http://www.lemonde.fr/idees/chronique/2011/11/17/ellada-agapi-mou_1604807_3232.html

Article du Spiegel sur l’Allemagne et la Grèce

Article du Spiegel traduit par Courrier international :

“Au XXe siècle, Berlin a été le roi de la dette”

« Au cours du siècle dernier, l’Allemagne s’est trouvée trois fois en faillite. Si elle a pu se relever, c’est entre autres au détriment de la Grèce, explique l’historien de l’économie Albrecht Ritschl. Elle ferait bien de s’en souvenir. »

Extraits :

« Helmut Kohl, a refusé d’appliquer l’Accord de Londres de 1953 sur les dettes extérieures de l’Allemagne, qui disposait que les réparations destinées à rembourser les dégâts causés pendant la Seconde Guerre mondiale devaient être versées en cas de réunification. Quelques acomptes ont été versés. Mais il s’agissait de sommes minimes. L’Allemagne n’a pas réglé ses réparations après 1990 – à l’exception des indemnités versées aux travailleurs forcés. Les crédits prélevés de force dans les pays occupés pendant la Seconde Guerre mondiale et les frais liés à l’occupation n’ont pas non plus été remboursés. A la Grèce non plus.  »

« Les Grecs sont parfaitement au courant des articles hostiles à leur égard parus dans les médias allemands. Si le vent tourne dans le pays, de vieilles revendications liées aux réparations de guerre pourraient refaire surface, y compris dans d’autres pays européens. Et si l’Allemagne se trouve contrainte de les honorer, nous y laisserons notre chemise.  »

La suite sur Courrier international : “Au XXe siècle, Berlin a été le roi de la dette”

Où mène la surenchère de clichés…

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Affiches du FPÖ autrichien:

Le Grec qui ne fait pas d’efforts, qui prend l’argent de l’Europe… et à cause duquel les Autrichiens n’ont plus ni hôpital ni travail.

Bref du racisme dans sa plus simple expression.

Après tout est-ce si différent de l’image entretenue par  les chaînes de tv et les journaux  européens en ce moment?

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Allemands vertueux et Grecs intempérants?

Autre rappel historique:

Selon Albrecht Ritschl, professeur en histoire de l’économie, « le plus gros défaut de paiement de l’histoire ne vient pas des Grecs, mais des Allemands. »

Celui-ci a relevé au moins trois faillites allemandes au XXe siècle, ce qu’il rappelle dans  une interview au Spiegel parue le 21 juin 2011 (Euro-Krise “Deutschland ist der größte Schuldensünder des 20. Jahrhunderts”, extraits en français dans  l’édition belge de l’Express).

Malgré cela la presse française se fait uniquement l’écho d’analyses sur le caractère éternellement endetté de l’état grec, depuis sa création.Ainsi les clichés fleurissent, entre Européens du nord toujours vertueux et Européens du sud, sans aucune mise en perspective.

Un autre journal allemand a calculé que, ramené à un taux de 3% par an et au pouvoir d’achat d’aujourd’hui, le prêt forcé que la Grèce a du consentir à l’Allemagne pendant la 2e guerre mondiale reviendrait aujourd’hui à 70 milliards d’euros, jamais remboursés (article de Die Wielt du 17 septembre 2011).

La Grèce fait partie des pays qui avaient généreusement accordé à l’Allemagne un moratoire sur sa dette en attendant la réunification (accord de Londres de 1953); quand la réunification est venue personne n’en a plus parlé au motif qu’intégrer l’ex-RDA coûtait beaucoup à l’Allemagne (article paru dans the Guardian du 21 juin 2011).

La deuxième guerre mondiale, c’était il y a 65 ans.

Mais les Grecs en auront au moins jusqu’à 2050 pour rembourser leur dette actuelle!

Des prêts grecs de 1981 ne sont toujours pas remboursés.

La question de la dette allemande à la Grèce est donc aussi légitime que celle de la dette grecque à ses créanciers actuels…

Réponse à l’article du Monde « Grèce-Europe : le grand malentendu » du 16/11/2011.

(Ce billet plébiscité par nos lecteurs, est remis à la « une » du blog, le dossier du journal « Le Monde » sur la Grèce et l’Europe étant toujours en circulation; les billets plus récents se trouvent sous l’article).

Envoyé au Service courrier des lecteurs du Monde.

Bonjour

Je voudrais réagir à l’article « Grèce-Europe : le grand malentendu » du 16/11/2011.

Je ne répondrai pas à tout ce que cet article comporte de contre-vérités. Je voudrais surtout vous faire comprendre à quel point cet article peut être ressenti comme totalement biaisé et totalement anti-grec, dans quasiment la moindre de ses phrases.

Mon opinion en tout cas, est que cet article fait dans le mishellénisme pur et simple.

J’attirerai seulement votre attention sur ces éléments, un peu pêle-mêle à l’image de cet article qui mélange un peu tout:

1/ Je constate qu’on n’a pas besoin de Platon pour faire entrer la Bulgarie et la Roumanie dans l’UE; enquiquiner les Grecs en parlant de l’antiquité n’a donc pas de sens.

2/ Vous ironisez sur la position de la Grèce au sujet de la « République de Macédoine », sans prendre jamais la peine d’aller voir ce qui se fait du coté de Skopje pour comprendre les réactions grecques.

Je vous joins donc une photographie du Premier ministre de la « République de Macédoine » déposant une gerbe devant une carte de la « Grande macédoine slave » incluant… Thessalonique, 2e ville grecque. Cet irrédentisme grotesque et délirant ne vous choque pas. Que la Grèce veuille s’en préserver en étant ferme sur la question du nom, que Tito avait mise en avant pour promouvoir cet irrédentisme, si…

J’imagine ce que vous auriez écrit si le premier ministre de la Grèce déposait une gerbe sous une carte de la « grande Grèce » incluant la « République de Macédoine. » Allez donc lire les manuels scolaires en « République de Macédoine », admirer les statues monumentales érigées par ce pays, parlez-en aussi à vos lecteurs…

3/ Lorsque vous écrivez que la Grèce n’est pas si européenne que cela…

C’est vraiment le comble, à moins de limiter l’Europe à l’Europe latine, anglo-saxonne et germanique. Parler de l’Europe en ne se référant qu’à cette Europe-là est un abus de langage que l’on retrouve même parfois en Europe orientale, tant l’Ouest de l’Europe impose cette vision des choses. Votre Europe est Carolingo-centrée, si vous me permettez ce barbarisme. L’Europe carolingienne n’était pas et n’a jamais été toute l’Europe.

4/ Concernant les choix stratégiques que vous présentez comme partiellement « non européens », en ignorant complètement ce qui peut se passer, par exemple, en Allemagne :

Il est normal que les territoires situés aux marches de l’Europe, ici entendus comme les pays-frontières, les portes de l’Europe, aient une histoire et une diplomatie ou une culture en accord avec leur position géographique et géopolitique.

A savoir les pays tels que la Grèce, l’Espagne, les pays d’Europe de l’Est, ou l’Allemagne qui n’est plus vraiment une marche, mais qui est l’héritière d’une très ancienne vision eurasiatique qui l’avait conduite, dans l’histoire, à coopérer soit avec la Russie soit avec l’Empire ottoman. Cela ne fait pas de l’Allemagne un pays moins européen.

Les pays tels que la Grèce et les pays slaves de l’Europe du Sud-Est, constituent les marches de l’Europe, dont la culture était celle de l’Empire romain d’Orient que les historiens occidentaux ont été les premiers à appeler « byzantin » pour faire oublier qu’il était avant tout, historiquement « romain » (les Turcs appellent toujours les Grecs « Rum » en plus de « Yunan »). Ces peuples ont vu la sphère d’influence de l’Empire qui les résumait, de plus en plus rognée : à l’Est, par l’avancée du monde arabo-, puis turco-musulman. à l’Ouest par la querelle politico-religieuse, qui a brisé l’unité spirituelle qui pouvait existait du temps des premiers Chrétiens d’Europe.

5/ Quand vous parlez de l’évolution des Grecs depuis l’antiquité, c’est manifestement en ignorant totalement toute la richesse intellectuelle qui fut celle des Grecs après l’antiquité, qu’on limite, à tort, à sa dimension religieuse, et surtout en ignorant les échanges intellectuels entre ces Grecs-là et l’Ouest de l’Europe :

Vous ignorez l’apport des savants Grecs du Moyen-âge à la renaissance italienne, vous ignorez leur production culturelle (voir par exemple la Souda et ce que l’on appelle la renaissance grecque, ou la littérature médiévale mêlant influences occidentales et culture grecque en Crète, à Chypre, dans le Péloponnèse). Avec ensuite il est vrai, un grand vide en terme de production culturelle et notamment littéraire sous l’Empire ottoman. Mais un vide rapidement rattrapé ensuite grâce à un foisonnement d’échanges intellectuels entre les élites culturelles grecques et européennes aux 19e et 20e siècles.

Il est impossible de résumer cela en quelques lignes. Pour parler de la culture grecque, on peut vouloir brosser l’histoire à grands traits en citant des dates tirées des manuels, ou au contraire choisir d’en avoir une connaissance intime en se plongeant dans cette production intellectuelle sans a priori.

6/ Vous citez les Grecs d’Asie mineure pour sous-entendre que ce n’est qu’après la défaite grecque de 1923 que les Grecs se seraient ancrés en Europe.

C’est tout à fait abusif. Que dire de la France avec son outre-mer? Serait-elle moins européenne, au motif que des Français ont aussi créé une France du Pacifique ou d’Amérique?

Les Grecs avaient le désir de réunifier les Grecs dans un même Etat. Et alors? A l’époque cela n’avait rien d’exceptionnel. Cela n’efface en rien le fait que les Grecs d’Asie mineure, ne sont à l’origine qu’une émanation des Grecs de l’autre rive la mer Egée.

Les Grecs d’Asie mineure avaient été confrontés à leur submersion démographique par l’élément turc à partir du 13e siècle notamment. Progressivement, ils sont devenus minoritaires en Anatolie alors qu’ils étaient majoritaires en Anatolie centrale, occidentale et du nord avant l’arrivée des Turcs. Beaucoup ont rejoint le peuple turc en s’islamisant et en se turcisant; ceux-là ont pour descendants des Turcs de Turquie, et ont apporté une partie de sa culture à la Turquie actuelle. Certains Grecs d’Anatolie, tout en restant grecs, ont même perdu leur langue en raison de leur submersion progressive par l’élément turc, mais ont pu conserver leur identité grâce au système communautariste ottoman qui instaurait une séparation ethno-religieuse et interdisait la conversion des Turcs musulmans au christianisme, les empêchant de leur côté de devenir Grecs. Plusieurs centaines de milliers de Grecs d’Asie mineure ont été exterminés au début du 20e siècle en même temps que les Arméniens et les Assyro-Chaldéens, avec un sens de l’organisation soufflé au pouvoir turc par ses conseiller militaires allemands. Ainsi la moitié des Grecs du Pont (nord-est de la Turquie). L’échange de population était peut-être le seul moyen de permettre aux survivants de ne pas disparaître.

7/ A ce propos, je suis assez étonné par la façon dont vous présentez la guerre gréco-turque de 1919-1923.

Vous commettez un anachronisme en indiquant que « la Turquie de Mustapha Kemal Atatürk reconquiert une partie de ses territoires perdus ». Ce n’est pas l’Etat-nation turc, la Turquie, qui avait perdu des territoires en 1919, mais l’Empire ottoman allié de l’Allemagne.

Et c’est le Sultan de Constantinople (les Turcs disaient encore « Konstantiniye »), qui avait signé le traité de Sèvres, et accepté que reviennent à la Grèce certaines terres où vivaient des Grecs en Asie mineure et en Thrace.

La France avait d’ailleurs combattu contre les troupes kémalistes en Anatolie avant de changer d’avis et de favoriser Kémal au détriment des Grecs.

Il est curieux que vous ne critiquiez pas le fait qu’un mouvement nationaliste turc, ait voulu prendre possession de terres cédées par le Sultan de l’Empire ottoman, mais que vous reprochiez aux Grecs d’avoir voulu « reconquérir l’Empire byzantin ». La « grande idée » dont vous parlez, se limitait aux terres où vivaient des Grecs; parler de « reconquête de l’Empire byzantin » n’a de sens que si l’on parle de l’Empire byzantin des derniers siècles, celui qui ne comptait presque plus que des populations grecques à force d’être réduit à peau de chagrin.

8/ Pour finir, il existe en Grèce un vrai amour de la France.

Je ne parle pas du temps où l’armée de l’air grecque était une des rares armées de l’air en Europe à acheter des Mirage-2000 et à donner du travail aux travailleurs français.

Je parle du monde intellectuel grec, des choix de la Grèce dans les moments décisifs.

Aujourd’hui on voit monter en France un racisme économique envers la Grèce et certains pays du Sud, assez risible quand on voit comment certains pays du nord analysent l’économie française…

Et une vision étriquée qui voudrait limiter l’Europe à l’Ouest de l’Europe, en raison d’une incapacité à concevoir la question des marches de l’Europe.

Vous êtes le reflet de cela.

Le peuple grec est en ce moment humilié.

Quand il se relèvera, il se souviendra peut-être de ceux qui, en lui prêtant, lui ont craché au visage, et des autres…

Cordialement

A.O